Il est né en 1962 à Orneta, une belle petite ville de Warmie, quelque part entre Olsztyn et Elbląg. Il rencontre sa future femme Danuta, ... dans le bac à sable alors qu’ils sont jeunes enfants, mais c’est seulement à l'âge de 16 ans, à la discothèque de l'école qu’il lui révèle ses sentiments. C’est le début d’une grande histoire qui durera toute sa vie, ce que nous allons vous raconter.

L’année 1981 marque le moment où les Polonais ressentent un vent de liberté pour la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. A cette période-là, Andrzej est à l’école sport-études à Elbląg où il partage son temps entre ses deux amours : Danuta et le handball. C’est à cette époque qu’il découvre aussi une nouvelle passion : celle de jouer de la guitare. Il se perfectionne dans un groupe de blues, fondé à l'école avec ses amis pensionnaires. C’est ici que commence l'histoire, comme sortie directement du film « All that I love » de Jacek Borcuch. Avides de liberté, les jeunes garçons veulent jouer la musique qu'ils aiment mais le 13 décembre, du jour au lendemain, tout devient très difficile. Malgré les épreuves, le groupe continue de jouer, remportant même quelques succès dont le plus important est le concert des lauréats lors de la revue des groupes amateurs à Elbląg. Cependant, la carrière du groupe de musiciens en herbe s’interrompt définitivement parce que les membres se dispersent dans diverses régions de Pologne pour poursuivre leurs études.

À cette époque, la carrière sportive d’Andrzej se développe intensément. Immédiatement après avoir obtenu son baccalauréat, il intègre l'équipe de handball d'Elbląg, puis peu de temps après, il reçoit la proposition de rejoindre l'équipe de première ligue de Płock. C’est ainsi qu’avec son épouse Danuta, ils emménagent dans leur premier appartement à Płock. Leurs enfants, Michał et Aleksandra, y naissent, et c'est là qu'Andrzej reçoit sa première offre de contrat à l’étranger, en Suisse. Un bon travail à l'étranger est sûrement le rêve de nombreux Polonais au début des années 90, mais il s'avère rapidement que la Suisse est loin d’être le paradis escompté pour Andrzej. Tout d'abord, la loi de l’époque ne l'autorisait pas à emmener sa famille de Pologne avec lui, ni sa femme, ni ses deux jeunes enfants (2 et 4 ans). De plus, les réglementations locales font obstacle à la poursuite du développement de sa carrière en Suisse, notamment la contrainte pour les équipes sportives de ne pouvoir intégrer qu'un seul étranger dans une équipe donnée. Cette restriction combinée à d'autres font, de la « terre promise » un lieu hermétiquement fermé, voire hostile, et poussent Andrzej à envisager sérieusement de mettre fin au contrat et de retourner dans son pays. A ce moment précis, une autre coïncidence inespérée se produit : un ami luxembourgeois invite Andrzej à lui rendre visite, et à son arrivée, il lui propose une participation sans engagement pour un sparring avec l'équipe locale.

Les Luxembourgeois sont enchantés par le style de jeu d'Andrzej, son efficacité sur le terrain et son professionnalisme. De plus, il apparait vite qu’il n’y a aucun obstacle à faire venir toute sa famille pour le rejoindre. Mieux encore, les Luxembourgeois sont prêts à se rendre en personne en Pologne pour convaincre Danuta, afin que sa femme s’installe au Luxembourg ce qui permettrait à son mari de poursuivre plus facilement sa carrière professionnelle dans le pays de la Moselle. Ils y vont et réussissent à la convaincre et c'est ainsi qu'en 1991 la famille Gulbicki se retrouve au Luxembourg. Ainsi Andrzej commence à travailler comme joueur dans l'équipe de handball à Esch-sur-Alzette. Puis tout s’accélère encore d’une manière incroyable. Andrzej superforme pendant deux ans à Esch. Il passe alors au Standard Luxembourg (club de Bonnevoie), ce qui permet à l'équipe de s'envoler en 1ère ligue, pour finalement s’accaparer de la deuxième place. Le club est parrainé par une entreprise de construction allemande, Hochtief, ce qui aura un impact significatif sur la future carrière professionnelle d'Andrzej.

Au bout de trois ans, Andrzej Gulbicki quitte le Standard pour le club de Schifflange qui annonce la fin de sa carrière de joueur mais qui lui donne l’opportunité de devenir entraîneur. Il faut dire ici qu’au moment de son départ de Pologne, il obtient les qualifications d'entraîneur à l'Académie d'éducation physique de Gdańsk (équivalent d’une université). Ce diplôme lui permet de parfaire ses connaissances théoriques et pratiques et de poursuivre par un diplôme d'entraîneur à Dortmund, auprès d’une institution formant des entraîneurs de première ligue de la Bundesliga. Pendant les cours là-bas, il rencontre de nombreux athlètes faisant partie de l'élite des sports allemands et d’autres pays. Il reste en contact étroit avec beaucoup d'entre eux à ce jour.

Les qualifications acquises permettent à Andrzej de commencer à entraîner dans le même club où il termine sa carrière de joueur. À Schifflange, il s'occupe de l'équipe junior et, immédiatement après avoir obtenu son diplôme de formation à Dortmund, on lui propose de former l'équipe nationale junior, qu'il dirige deux années durant. Puis en janvier 2002, il reçoit la proposition de rejoindre l'équipe de Berchem, ce qui est pour lui, en tant que jeune entraîneur, un honneur particulier, car cette équipe est déjà double championne du Luxembourg. Il travaille pour le club de Berchem pendant 6 ans et son équipe remporte deux titres de champion et trois coupes du Luxembourg. Par la suite, il change encore de club et entraine à Bascharage où son équipe remporte une coupe du Luxembourg. Après trois ans de travail, on lui propose un contrat à l'étranger, pour entrainer l'équipe de Sarrelouis, avec laquelle il est promu en 2e ligue de la Bundesliga. Ainsi au bout de trois nouvelles années de travail intensif d'entraîneur, ses efforts sont couronnés de succès. En effet, Saarlouis sous la direction d'Andrzej reste, puis s'installe définitivement dans la deuxième ligue. Cependant, malgré la série de succès obtenue en tant qu’entraîneur en Allemagne, les difficultés dues aux déplacements permanents liés aux entraînements sont de plus en plus lourds à gérer. Il faut souligner que tout ce temps Andrzej vit avec sa famille au Luxembourg. Après plus de trois ans de nombreux voyages et participations aux camps d'entraînement, des rencontres sportives, des matches de championnat, Andrzej décide à contrecœur de refuser la proposition d’un contrat à plein temps dans la ligue allemande et retourne sur le terrain luxembourgeois. Il poursuit sa carrière sportive et il remporte la Coupe du Luxembourg avec l'équipe de Dudelange. Par la suite, il évolue dans d’autres clubs tels que le HC Berchem où il obtient la Coupe du Luxembourg et au Handball Esch, où il termine sa carrière d'entraîneur avec trois titres nationaux et deux Coupes du Luxembourg.

Au total, dans sa carrière d'entraîneur luxembourgeois, Andrzej Gulbicki remporte six titres de champion et neuf coupes du Luxembourg, et ses équipes atteignent quinze fois la finale des matches de championnat ce qui est un record à l'échelle nationale. Aujourd’hui, il détient le plus beau palmarès et personne d'autre n'a remporté autant de titres en handball au Luxembourg.

Malheureusement, il s'avère qu'au Luxembourg il est impossible de vivre du sport, ni en tant que joueur professionnel ni même en tant qu’un entraîneur. Par conséquent, dès le début, la carrière professionnelle d'Andrzej se développe parallèlement à la voie sportive. Et donc, au tout début, à la fin des années 1990, il travaille chez Villeroi & Boch, tout simplement sur la ligne de production des tasses, en équipe 2x8. Ses ambitions, cependant, sont plus grandes et c'est là que l’entreprise Hochtief susmentionnée réapparait. La société, qui est le sponsor principal de l'une des équipes où Andrzej joue, l’envoie faire des études spécialisées de deux ans à Nuremberg. « Immobilienfachmann » (professionnel de l’immobilier), c'est le nom du cours qu'Andrzej suit, le prépare complètement au travail sur le marché immobilier. Il se forme en tant que spécialiste de la conception d'une part, et d'autre part la formation le prépare à la supervision de la construction et à la coordination de la mise en œuvre des projets de construction, du début, c'est-à-dire de l'achat du terrain, en passant par la construction, jusqu’à la vente de la propriété finie. Grâce à ces études, Andrzej peut commencer à travailler à Hochtief (rappelons-le, parallèlement au développement de sa carrière sportive). Cette société offre aussi un emploi à son épouse dans un premier temps, et quelques années plus tard, elle quitte le monde de l’industrie pour revenir à sa formation initiale, à savoir, l’éducation et elle devient enseignante à la maison relais luxembourgeoise.

Avec Hochtief, Andrzej Gulbicki construit le centre commercial Auchan et le complexe sportif la Coque au Kirchberg. Après 20 ans, lorsque Hochtief ferme son bureau au Luxembourg, le directeur de la succursale luxembourgeoise de cette société allemande décide d'ouvrir sa propre entreprise sous le nom de Residence Concept, offrant un contrat à neuf ingénieurs de Hochtief récemment dissout. Andrzej accepte un poste dans cette équipe de spécialistes et de personnes expérimentées dans l'industrie de la construction, et ainsi sa carrière professionnelle prend une direction très spécifique pour les années qui suivent.

Aujourd'hui, après 30 ans de travail dans l'industrie de la construction et au moins autant sur le terrain, Andrzej a pris sa retraite. Les étagères affichent fièrement les nombreuses coupes et médailles, ainsi que l'instrument bien-aimé d'Andrzej - la guitare acoustique - qui fait son grand retour. Bien qu'Andrzej ait mis un terme définitif à sa spectaculaire carrière de sportif professionnel, après que la dernière équipe qu'il dirigeait ait remporté la coupe, en enlevant ses chaussures et en disant le sacramentel « merci handball », il n'a pas abandonné le sport ! Pendant des années, lui et sa femme passent toutes leurs vacances à skier dans les Dolomites italiennes. Et ils entendent poursuivre cette tradition. Ils aiment aussi faire de la randonnée ensemble, faisant jusqu’à 20 km par jour. Ils planifient leur « grand voyage », à savoir le pèlerinage sur le chemin de Saint Jacques de Compostel et de Saint François, en guise de remerciement pour toute leur vie, qui a, sans aucun doute, tout d’une success story.

Les enfants de Danuta et d’Andrzej suivent les traces de leurs parents : leur fils Michał est diplômé de l'école de sport ici au Luxembourg. Pendant de nombreuses années, il joue pour l'équipe nationale luxembourgeoise, bien sûr pour l'équipe de handball. Et bien évidemment pendant de nombreuses saisons sous l'œil attentif de son entraîneur - son père. Après les succès dans l'équipe avec Berchem, il part étudier en Suisse, où il joue dans la 1ère ligue, et après son retour au Luxembourg, il retourne dans l'équipe nationale, avec laquelle il joue pas moins de 50 matchs jusqu'à ce qu'il décide de mettre fin sa carrière de joueur. Il est actuellement enseignant au lycée sportif de Cents à Luxembourg.

Leur fille Aleksandra est diplômée en histoire de l'art et en allemand à l'Université de Heidelberg et a été directrice du Musée des mines de Rumelange pendant 6 ans. Lorsqu'elle donne naissance à son enfant, elle quitte ce travail et elle est maintenant institutrice.

Toute la famille Gulbicki a des liens forts avec le Luxembourg. Leur fille épouse un Luxembourgeois; le fils épouse une Luxembourgeoise. Andrzej qui s’est lié à une Polonaise, mais il a passé presque toute sa vie professionnelle avec des Luxembourgeois. Les équipes qu'il forme étaient bien sûr majoritairement composées par des Luxembourgeois, mais il y a eu aussi des Polonais. Il a toujours essayé d'amener les meilleurs joueurs de Pologne dans les équipes locales. La famille Gulbicki est également active dans la vie quotidienne de la communauté polonaise. Vous pouvez les rencontrer lors d'événements de la diaspora polonaise, de concerts de groupes polonais et d'événements liés à la Pologne. Danuta participe activement aux activités de l'association des femmes polonaises au Luxembourg (polki.lu). Mais dans le sport, ils soutiennent les Luxembourgeois. Car, comme le dit Andrzej Gulbicki : «  Mon fils a longtemps joué pour l'équipe nationale luxembourgeoise. Je l'ai formé pendant de nombreuses années. D'ailleurs, je soutiens le Luxembourg quand il joue contre la Pologne, parce que… je sais qu'ils n’ont pas de grandes chances de gagner ».